La petite fille au stylo bille.

Elle est là, devant son petit bureau jaune. Elle se demande comme s’y prendre, ce n’est pas facile. Ses capacités tactiles demandent encore à grandir. Elle a trois ans peut-être, quatre tout au plus. À cet âge là, on ne lui a pas encore montré comment tenir son stylo à bille. Alors elle essaye d’apprendre en regardant les autres.

Et principalement, les autres, c’est sa mère. Femme imposante de par son élégance, et sa manière tranchante de manier le verbe. On ose peu ou pas la contredire, la seule perspective de sa foudre donnant plutôt envie de se taire. Alors il faut trouver le moyen de l’atteindre quand même.

Et c’est par le moyen de l’écriture que la petite fille pense y arriver…

C’est qu’on est très occupé autour d’elle. Le monde de l’entreprise prend souvent toute la présence de parents gérants, et son frère et sa soeur oublient bien vite de l’attendre, dès lors qu’ils sont déjà rentrés dans leur propre rythme d’adolescent et de jeune adulte.

Par la parole aussi, tout tourne trop vite.

Les adultes semblent constamment avoir dix trains d’avance sur elle, et elle ne peut convenablement se définir sans qu’il soit déjà trop tard, que quelqu’un d’autre de plus mature ait repris la parole.

Mais pas dans l’écriture. Dans l’écriture on peut prendre le temps de choisir chaque lettre, chaque mot.

Pour elle, écrire, c’est enfin pouvoir se dire.

Alors elle prend la plume, ou la bille pour commencer. Et elle forme ses premières lettres, maladroites. Puis des mots arrivent. Une fois la machine de l’écriture en marche, plus rien ne l’arrête.

Et son monde s’ouvre enfin.

La fin

(et le début de l’histoire.)

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